Regards croisés sur les enjeux de la consommation de ressources

L’économie circulaire doit occuper une place centrale dans l’élaboration des politiques environnementales. Pour apprécier son impact sur la consommation de matières à l’échelle nationale comme internationale, l’atelier 4 des Assises des déchets 2024 prendra la forme d’un dialogue entre l’Ademe et le Groupe international d’experts sur les ressources. Interview de Doris Nicklaus, pilote de l’atelier et chargée de mission économie circulaire et recyclage au ministère de la Transition écologique.

Pourquoi dédier un atelier à l’empreinte matières ?

L’objectif est de montrer que maîtriser l’évolution de la consommation de matières est central si nous voulons limiter notre impact sur le climat, préserver la biodiversité et les autres compartiments environnementaux. Le premier intérêt de l’économie circulaire est justement de réduire la consommation de matières premières vierges et de mieux la maîtriser, car c’est un levier essentiel de la transition écologique.

NICKLAUS Doris - 18e Assises des déchets

Quels seront les points abordés ?

Dans un premier temps, l’objectif sera de partager, confronter les diagnostics sur la consommation de matières et les enjeux associés. Ensuite, les intervenants s’attacheront à démontrer l’intérêt de mesurer les empreintes. Enfin, ils pointeront l’urgence de mettre en place des politiques ambitieuses pour faire évoluer la consommation de matières.

Quelle sera la particularité de cet atelier ?

Sa forme sera originale, car il ne s’agira pas d’une table ronde avec 4 ou 5 intervenants, comme c’est le cas pour les autres ateliers. En effet, nous avons choisi de privilégier un format de regards croisés avec une vision mondiale, très macro, et un éclairage national : il y aura donc seulement deux intervenants sur scène qui dialogueront ; le rythme sera donc un peu différent.

Qui seront ces deux intervenants et pourquoi les avoir choisis ?

Pour la vision globale, nous aurons le privilège de recevoir Janez Potočnik. Ancien commissaire européen à l’environnement, il interviendra en tant que président de l’International Resource Panel (IRP), un groupe d’experts dont le secrétariat est assuré par le Programme des Nations Unies pour l’environnement et qui est en quelque sorte l’équivalent du GIEC, mais pour les ressources. L’IRP édite régulièrement des rapports sur les tendances de l’utilisation des ressources, dont les ressources matérielles, avec une prospective à l’horizon 2060. Ces travaux montrent notamment que corriger la trajectoire d’évolution des ressources est indispensable pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, a minima d’en réduire le coût et permettrait de limiter les impacts sur la biodiversité.

Le point de vue national sera quant à lui livré par un intervenant de l’Ademe. L’agence mène également de nombreux travaux sur l’empreinte, avec notamment, depuis 2021 la mesure de l’impact des scénarios de prospective sur la transition énergétique sur les empreintes carbone et matière. Il s’avère que, parmi les quatre scénarios élaborés, celui qui donne le plus de place à la sobriété a les empreintes matière et carbone les plus faibles. Cela met en lumière les limites des approches qui se basent exclusivement sur la substitution, par exemple le remplacement des énergies fossiles par des énergies renouvelables, car les conditions à mettre en œuvre pour leur production en l’absence de réduction de la consommation énergétique génèrent la consommation de beaucoup de ressources.

Pourquoi est-il pertinent de croiser des visions nationales et internationales ?

Les études permettent de se rendre compte que l’impact écologique peut être biaisé en fonction des matières ou des énergies qui sont importées. Par exemple, une voiture qui pèse une tonne en tant que produit fini a occasionné de la perte de matière tout au long de la chaîne de valeur, et sa véritable empreinte en matière peut s’élever jusqu’à 10 fois le poids final. Ces 10 tonnes et les impacts environnementaux associés ne seront cependant pas pris en compte sur un bilan à l’échelle nationale si uniquement l’assemblage a été fait sur le territoire. Avoir cette approche empreinte, ce regard d’ensemble, permet d’identifier de nouveaux leviers d’action.

“Un lieu d’échanges privilégiés”

“Les Assises des déchets sont un lieu d’échanges privilégiés entre différents acteurs et parties prenantes de la gestion et la prévention des déchets, ainsi que de l’économie circulaire. C’est un espace très interactif qui occupe une place importante dans le panorama national, car il permet de présenter les dernières évolutions des politiques publiques et de susciter un dialogue et des échanges constructifs sur ces politiques”.