La valorisation énergétique à un tournant ? – Elisabeth PONCELET

Après avoir été une filière quasiment honnie, la valorisation énergétique des déchets semble bénéficier d’un certain retour en grâce. Surtout pas comme filière prioritaire mais comme complémentaire des autres. Analyse d’Elisabeth Poncelet de la direction consommation durable et déchets de l’Ademe, pilote de l’atelier 6 consacré à ce sujet lors des prochaines Assises des Déchets.

 

Une précision pour commencer : l’incinération redevient-elle une solution de premier choix ?

Absolument pas. La priorité reste le développement de la prévention et du recyclage, avec un niveau d’effort qu’il ne faut pas ralentir. La valorisation énergétique n ’est plus une solution de traitement de masse: on ne construit aujourd’hui en France qu’un incinérateur par an quand les autres types de filières croissent à bon rythme. Pour autant, parce qu’il importe de détourner le maximum des déchets restants du stockage, mais aussi parce que la stratégie européenne a un objectif de considérer en 2020 le déchet comme une ressource, et parce que les politiques de gestion des déchets doivent intégrer la préservation des ressources, la valorisation énergétique est une des voies qu’il faut continuer d’explorer, les déchets étant une source d’énergie facile à mobiliser… mais sans jamais oublier les préoccupations environne-mentales et sanitaires.

 

C’est donc moins le mode traitement en lui-même que les perspectives énergétiques qui repositionnent l’incinération ?

C’est en tout cas une partie de l’explication. Dans une période économique difficile et après plusieurs an-nées d’augmentation des tarifs, il est devenu nécessaire d’ équilibrer et de stabiliser le coût des traitements des déchets. D’autant que l’augmentation prévisible des tarifs énergétiques rendra plus compétitive la valorisation des déchets. L’autre élément d’analyse est la notion de complémentarité, dans une logique multi-filières : la filière de valorisation énergétique s’intègre avec les autres filières, en respectant la hiérarchie priorisant prévention et recyclage mais en permettant aux territoires de construire une réponse complète de traitement de leurs déchets.

 

On observe donc des progrès techniques et organisationnels sur le terrain ?

Il est clair que ça bouge, notamment dans la recherche de mise au point pour la préparation et la valorisation de CSR (combustible solide de récupération), de biocombustible liquide ou gazeux, de biogaz, ne nécessitant souvent qu’une adaptation de sites industriels existants et donc avec une certaine acceptation sociale. Il y a du neuf aussi dans l’appropriation qu’ont de ces enjeux les industries potentiellement utilisatrices de ces énergies qui se rapprochent des industriels des déchets, ou enfin dans les approches territoriales qui se font jour ici et là où la valorisation énergétique peut apparaître comme le dernier mais nécessaire maillon pour fermer la boucle de l’économie circulaire. Cet atelier 6 des Assises sera l’ occasion de faire un point global sur le thème des enjeux économiques, sociaux et technologiques au plan national, européen et mondial jusqu’au partage de nombreuses expériences de terrain.

 

Site internet de l’Ademe : www.ademe.fr